Blasphemous – El Quejío

Blasphemous – El Quejío

7 mars 2024 0 Par Richter

« C’est bien le Gémissement. Il émane des profondeurs les plus enfouies de ce lieu, rampe en spirales, croît en son propre écho et se déforme dans les reliefs de bronze. Le cri de trois gorges jointes, né d’une même pénitence, d’un même deuil. La lumière y parvient rarement. Rien que le froid et le Gémissement. »

L’immense cloche résonne une dernière fois. Le sol s’effondre. De l’intérieur de Jondo, le Pénitent est entraîné dans la pénombre la plus totale, dans les Escarpements de la Complainte. Dans un dédale habité par des spectres et autres statues maudites, le Pénitent continue son pèlerinage. Il faut trouver le Gémissement, et accomplir la volonté du Miracle.

C’est dans une ambiance angoissante, ponctuée d’attaques de contrebasses et autres grincements morbides que le Pénitent progresse. Une intense nappe de basse fréquence constante fait froncer les sourcils et frémir les mains fermes tenant le contrôleur. Parfois, la distinction se fait difficile entre les violons et les cris grinçants provenant des profondeurs. Serait-ce là le Gémissement ? Une incarnation éthérée du Miracle.. ? Le rythme lancinant accompagne chaque pas du Pénitent vers son objectif pour lequel il ne reculera devant rien. Si ce sont là des voix ou des spectres, il n’en sait rien. Il avance. Parfois pris au piège au milieu de ces ruines dans lesquelles nulle lumière ne passe, sa volonté ne choira ni face aux fantômes tentant de le prendre à revers, ni face aux émanations toxiques défilant en ces lieux maudits.

Alors, un Prie-Dieu, salvateur, se dresse au détour d’un couloir, au milieu d’un pont. Si le cœur meurtri du Pénitent venait à s’égarer et s’éteindre en un dernier battement, celui-ci reviendra à ce Prie-Dieu, par la volonté du Miracle. De là, le Pénitent resserre une poigne déjà ferme sur la garde de Mea Culpa, la lame sainte qui lui a été donnée. Timide, il passe alors sous une arche.

C’est alors qu’il les voit. Trois sœurs, en longue robe noire, les mains jointes et une capirote témoignant de leur foi. Apparaissant comme des étoiles filantes. Tres Angustias (les Trois Angoisses en espagnol). L’arène prend feu. Et la musique démarre. Trois cordes, grinçantes comme les voix éthérées des Sœurs, le cri de trois gorges jointes, ponctuées des percussions qui battent en un seul cœur tandis que les trois sœurs, les trois furies, s’acharnent sur le Pénitent. Au fur à mesure du combat, le rythme s’accélère, le cœur bat plus vite, plus intensément, tandis que le rythme effréné des triolets, lancinant, immuable, d’une répétition aussi régulière que stressante, régule le rythme de la musique. Quelques motifs mélodico-rythmique de guitare rappelant encore et toujours les arabesques des musique espagnoles résonnent ici et là, témoignage de la direction artistique musicale générale du titre. Celles-ci gagnent en violence au fur et à mesure que la musique avance, les cordes de la guitare presque percutant le bois derrière elles en une attaque puissante, glaçante, soutenues par ces hurlements de cordes qui gagnent en horreur, criant à la mort, dans les suraigus, comme des cris de banshee dans la nuit noire.

D’autres voix, d’autres grincements se mêlent à cette frénésie insondable et ne deviennent plus qu’un brouhaha rythmique dont seuls les arpèges sont notre guide ; les Trois Sœurs se mêlent en une seule entité, incarnant leur même pénitence, leur même deuil.

                Libérées, vous trois avez prié d’une seule voix,

                Libérées, vous trois avez supplié d’une seule voix,

                Libérées, vous trois êtes nées d’un seul corps,

                Libres et sacrées, de la divine grâce

                Vous n’êtes plus trois, mais bien un seul.

De là, la violence ne fait que s’accroître dans cette phase ultime ou des rayons lumineux dévastateurs s’abattent dans l’arène, détruisant tout sur leur passage.  Le Pénitent doit en finir vite, les flammes consumant l’arène toujours plus, et la violence de cette entité exacerbée, incarnation maléfique de l’angoisse et du deuil le mettent en grand danger. Celles-ci parfois se séparent comme les cellules d’un même corps pour redevenir trois, et cette sainte Trinité profite de la confusion pour s’acharner toujours plus sur le Pénitent, avant de ne redevenir qu’un. Alors, le coup fatal est porté, et les Trois Angoisses, mues en une seul Deuil, se désintègre dans une explosion de flammes. L’arène retrouve son calme. Le Gémissement se résonnera plus.

El Quejío signifie le Plaignant en espagnol, renvoyant ainsi certainement à l’idée du Gémissement et à ces cordes se confondant en hurlements de femme, témoignant d’une douleur insoutenable tout au long de la musique. L’intensité et la répétition de celle-ci sont autant d’éléments qui la rendent véritablement prenante et fascinante. Par ailleurs, chacun des titres de musique de l’Original Soundtrack de Blasphemous sonne comme un commandement divin:

  • Dame Tu Tormento
  • La Muerte de los Relinchos
  • Tierras de Azafrán
  • Que las Campanas Me Doblen
  • Una Senda de Pasos Blancos
  • Gélida Expiración
  • Entregarás Tu Rostro a La Señora
  • Vuestra Faz Denegrida
  • Cantes de Confesión
  • Ten Piedad
  • Arpegios en Ocre
  • El Quejío
  • Taranto a la Hermana Mía
  • El Temple de los Abanicos
  • Coplas de Incienso
  • Entre Bordados
  • Prohibidos y Cubiertos de Polvo
  • Lágrimas de Grana y Oro
  • Al Compás de Tus Contornos
  • Y Yo Fuego Te Daré
  • Para un Mártir del Compás
  • Saetas De Altos Balcones
  • Su Beso de Plata
  • Peldaños Hacia la Santidad
  • Mirada de culpa
  • Que en Procesión Marchen
  • Por la Vía de las Procesiones Antiguas
  • Donne-moi ton tourment
  • La mort du hennissement
  • Terres de Safran
  • Laisse le glas sonner pour moi
  • Un chemin de marches blanches
  • Expiration glacée
  • Tu donneras ton visage à la Dame
  • Ton visage noir
  • Chants de confession
  • Aie pitié
  • Arpèges en ocre
  • Le Plaignant
  • Tarente à ma sœur
  • Le Temple des Éventails
  • Couplets d’encens
  • Entre broderie
  • Interdit et couvert de poussière
  • Larmes d’écarlate et d’or
  • Au rythme de vos contours
  • Et je te donnerai du feu
  • Pour un martyr de la boussole
  • Flèches de hauts balcons
  • Son baiser d’argent
  • Des pas vers la sainteté
  • Regard coupable
  • Puissent-ils défiler en procession
  • Sur le chemin des anciennes processions

Aurez-vous la détermination suffisante pour affronter les épreuves du Miracle, Pénitent du Silence ?

Le combat est disponible sur YouTube (mais la vidéo n’est pas de moi).